Face à une dépendance massive aux importations de volailles, le Gabon s’est engagé dans une course contre la montre pour atteindre l’autosuffisance alimentaire avant 2027. Portée par la vision du président Brice Clotaire Oligui Nguema, la décision d’interdire les importations de poulets s’accompagne d’investissements massifs pour développer la filière avicole nationale.
En décembre 2024, le gouvernement gabonais a acté l’interdiction des importations de poulets à partir de janvier 2027. Cette mesure vise à réduire la dépendance du pays vis-à-vis de l’extérieur et à renforcer sa souveraineté alimentaire. Elle s’inscrit dans une stratégie globale de relance du secteur agricole et de diversification économique. En juillet 2025, le président Oligui Nguema a consolidé cette orientation en annonçant la création de six fermes avicoles modernes réparties à travers le territoire national.
Actuellement, le Gabon ne produit qu’environ 4 000 tonnes de poulets de chair par an, contre 55 000 tonnes importées. Le gouvernement entend désormais créer un environnement propice à la mise en œuvre de cette politique ambitieuse.
Une filière en reconstruction
Sous l’impulsion du Chef de l’État, le ministère de l’Agriculture accélère la mise en œuvre de la réforme. Un recensement national des éleveurs, organisé du 15 juillet au 31 août 2025, a permis d’identifier les acteurs de la filière afin d’assurer un accompagnement ciblé.
Cette initiative s’inscrit dans la continuité du forum de haut niveau tenu à Libreville le 25 août 2025, consacré aux mécanismes garantissant une transition efficace sans provoquer de pénurie sur le marché local. Le vice-président du gouvernement, Alexandre Barro Chambrier, y avait rappelé « l’urgence d’agir » face à la dépendance structurelle du pays aux importations de volailles.
Des défis logistiques et financiers persistants
L’élevage de poulets et la production d’œufs offrent de réelles perspectives économiques pour les entrepreneurs gabonais. À Port-Gentil, F.N., quinquagénaire issu du secteur pétrolier, exploite depuis dix ans une petite ferme avicole. Selon lui, « la décision gouvernementale pourrait encourager de nombreuses reconversions professionnelles ».
D’autres, comme M., agent immobilier de 40 ans, se montrent plus prudents : « Il faut évaluer les conditions avant de se lancer. Tout investissement comporte des risques. » À Libreville, T.N., jeune vendeur d’œufs de 28 ans, partage cette réserve tout en saluant une mesure « courageuse et nécessaire ».
L’aliment pour volailles : un enjeu central
Le principal frein reste l’approvisionnement en aliments pour volailles. À Port-Gentil, plusieurs éleveurs affirment n’avoir reçu aucune livraison depuis plus de six mois.
« Sans stocks suffisants, la situation pourrait vite devenir critique », alerte G.E., aviculteur local.
Pour atténuer ces difficultés, le gouvernement envisage de produire de la farine de manioc à grande échelle comme substitut partiel au maïs et au blé importés. La ferme Agrobag, relancée sous la période de transition, joue un rôle clé dans cette stratégie de substitution et de renforcement de l’autonomie alimentaire du pays.
Avec cette réforme ambitieuse, le Gabon veut transformer une dépendance chronique en opportunité économique. Le succès de cette politique reposera sur la capacité du pays à structurer sa filière, soutenir les éleveurs et garantir un accès régulier à des intrants locaux à coût maîtrisé.


